Un film documentaire de type animalier peut s’approprier quelques caractéristiques de la fiction. Que ce soit avec un synopsis, déclarations d’intention et le scénario, le cinéma documentaire n’échappe pas à l’écriture ! Cependant, le cinéma documentaire animalier moderne semble ressortir par définition d’une démarche de découverte, d’enquête, d’exploitation qui paraît mal s’associer à la notion de scénario. Mais alors, le scénario est-il nécessaire à la réalisation d’un film documentaire animalier ? Quelles sont les limites de l’utilisation d’un scénario pour ce genre de film ?

Scénariser le réel ?

La forme même du documentaire par définition, semblerait interdire toute scénarisation préalable, on ne peut anticiper le réel ou la matière du film à venir voire même la base imprévisible de sa réussite. L’écriture d’un scénario, bien qu’il divise encore les professionnels de ce cinéma, peut avoir plusieurs raisons positives à son utilisation dans ce domaine. Il peut servir à convaincre d’éventuels producteurs ou à expliquer à une équipe dans quelle aventure elle va s’embarquer. La rédaction d’un scénario peut aussi permettre aux réalisateurs de prévoir à l’avance ce qu’ils vont tourner, dénoncer ou illustrer et donc, la façon dont ils souhaiteront le montrer. Elle peut-être indispensable afin de préciser le point de vue utilisé pour le film (point de vue de l’animal ou du cinéaste sur la nature).

Dans tous les cas, il ne faut pas oublier que le cinéaste, qu’il soit spécialisé dans le documentaire ou dans la fiction, est un auteur qui raconte une histoire. Il doit alors se poser la question suivante : « Quelle histoire suis-je en train de raconter et pour qui ? ».

Une pratique controversée

Pourtant, cette pratique de scénariser les films documentaire animalier, de plus en plus utilisé (comme par exemple les films de Disney Nature) est très souvent critiquée, car elle falsifierait le réel. Certains réalisateurs comme Luc Jacquet, n’ont pas eu besoin de concevoir un scénario élaboré pour réaliser La Marche de l’Empereur (2004) car il pouvait être facilement résumé en quelques lignes. Les autres soucis de l’utilisation du scénario dans ce genre de film, s’étend bien plus loin qu’une simple question de rédaction ou de la caractérisation d’un film à vif, mais de celui de la place de l’animal dans ce type de cinéma. La question de l’anthropomorphisme et du bien être animal sont plus problématiques.

Dans le concept de l’anthropomorphisme, le modèle de toute chose est l’Homme. Dans le film documentaire animalier, ce concept est un outil narratif servant à créer une certaine empathie entre le sujet et le spectateur. L’idée est de rendre humain l’animal par un processus de fiction, avec donc, de la mise en scène et de la scénarisation. De plus en plus de films documentaires animaliers utilisent la technique du scénario afin de créer des animaux, des personnages avec des prénoms, des caractères et une histoire. La mise en scène et l’humanisation des animaux est devenue très populaire. L’anthropomorphisme ne serait pourtant, pas une si mauvaise chose. Le fait d’humaniser les animaux serait une manière de repenser le lien entre l’humain et l’animal et ainsi, se rendre compte de la diversité de la vie. Le but étant de reconsidérer le statut de l’animal.

Dressage de cervidé en studio.
L’utilisation de subterfuges remet en cause l’authenticité des images

L’utilisation d’un scénario et d’une mise en scène dans ce genre de film semble efficace et important, mais comme vu précédemment, une utilisation extrême de cette pratique peut-être vu comme une facilité voire comme de la triche et de souffrance animale ! Certains réalisateurs utilisent de nombreux subterfuges comme le nourrissage et le dressage d’animaux (domestique ou sauvages). La technique des animaux dressés est de plus en plus utilisée, notamment celle de l’imprégnation (ou dit « de l’empreinte »). Cela signifie que l’animal, dès sa naissance, va être habitué à la présence humaine, demandant plusieurs années de préparation. Le film de Jacques Perrin Le peuple migrateur sorti en 2001 a utilisé cette technique. À l’origine, le concept serait né d’un bon principe et pourtant, l’authenticité de l’image est remise en question, tout comme le bien être animal, où celui-ci est représenté à l’écran comme sauvage alors qu’il ne l’est plus vraiment.

Certains réalisateurs ayant moins de scrupules que d’autres, peuvent aller jusqu’à des pratiques barbares ! Nous pouvons citer l’équipe du film Le Désert de l’Arctique produit par Disney en 1958, qui souhaitait prouver le comportement suicidaire des lemmings en collectif. Pour cela, l’équipe a tout simplement acheté des animaux pour les jeter du haut d’une falaise. Ce n’est qu’en 1982 que le secret barbare de ce tournage à été dévoilé.

Suicide de lemmings.

Suite à ce genre de comportements et méthodes, l’utilisation d’un scenario pour ces films peut semble être un pari risqué. En cause, avec de la triche, de la manipulation, des erreurs ou de la maltraitance de la part de certains réalisateurs animaliers, ce métier se risque à beaucoup de controverse. Et ainsi, être totalement décrédibilisé, humilié et dénaturalisé. Et pourtant, bon nombre de réalisateurs refusent d’utiliser à l’extrême le scénario et préfère, en revenir à la bonne vieille méthode qu’est la patience.

L’écriture d’un scénario, même quelques lignes est presque primordial et aide à la réalisation. Mais il ne faut pas oublier que la conception d’un scénario n’est qu’un gros coup de pouce et qu’il ne fera pas tout le travail. Etre cinéaste de documentaire animalier demande de la patience, de l’entraînement, du professionnalisme et un respect envers les animaux. Heureusement pour les principaux protagonistes de ces histoires qui sont, les animaux,  la protection et la sensibilisation à travers le cinéma, devient de plus en plus responsable.

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